CITE DU VATICAN,
15 DEC 2009 (VIS).
Aujourd'hui a été rendu public le Message de Benoît XVI pour la XLIII Journée mondiale de la paix (1 janvier 2010), intitulé:
"Si tu veux construire la paix, protège la création". En voici des passages saillants:
"Si, en effet, à cause
de la cruauté de l'homme envers l'homme, nombreuses sont les menaces qui mettent en péril la paix et le développement intégral authentique de l'homme: guerres, conflits internationaux et
régionaux, actes terroristes et violations des droits de l'homme, et les menaces engendrées par le manque d'attention voire même par les abus vis-à-vis de la terre et des biens naturels, qui sont
un don de Dieu, ne sont pas moins préoccupantes. C'est pour cette raison qu'il est indispensable que l'humanité renouvelle et renforce l'alliance entre l'être humain et l'environnement, qui doit
être le miroir de l'amour créateur de Dieu, de qui nous venons et vers qui nous allons.
En 1990, Jean-Paul II parlait de crise
écologique..., un appel est encore plus pressant aujourd'hui, face aux manifestations croissantes d'une crise qu'il serait irresponsable de ne pas prendre sérieusement en
considération. Comment demeurer indifférents face aux problématiques qui découlent de phénomènes tels que les changements climatiques, la désertification, la dégradation et la perte de
productivité de vastes surfaces agricoles, la pollution des fleuves et des nappes phréatiques, l'appauvrissement de la biodiversité, l'augmentation des phénomènes naturels extrêmes, le
déboisement des zones équatoriales et tropicales? Comment n��gliger le phénomène grandissant de ce qu'on appelle les réfugiés de l'environnement: ces personnes qui, à cause de la dégradation de
l'environnement où elles vivent, doivent l'abandonner, souvent en même temps que leurs biens, pour affronter les dangers et les inconnues d'un déplacement forcé? Comment ne pas réagir face
aux conflits réels et potentiels liés à l'accès aux ressources naturelles? Toutes ces questions ont un profond impact sur l'exercice des droits humains, comme par exemple le droit à la vie, à
l'alimentation, à la santé, au développement.
La crise écologique ne peut être appréhendée séparément des questions qui s'y rattachent... Il est donc
sage d'opérer une révision profonde et perspicace du modèle de développement, et de réfléchir également sur le sens de l'économie et de ses objectifs, pour en corriger les
dysfonctionnements et les déséquilibres. L'état de santé écologique de la planète l'exige. La crise culturelle et morale de l'homme le requiert aussi et plus encore, crise dont les
symptômes sont évidents depuis un certain temps partout dans le monde... Les situations de
crise...sont aussi morales et liées les unes aux autres. Elles obligent à repenser le cheminement commun des hommes. Elles contraignent, en particulier, à adopter une manière de vivre basée sur
la sobriété et la solidarité, avec de nouvelles règles et des formes d'engagement s'appuyant avec confiance et avec courage sur les expériences positives faites et rejetant avec décision celles
qui sont négatives. Ainsi seulement, la crise actuelle devient-elle une occasion de discernement et de nouvelle planification.
La dégradation de l'environnement est souvent le résultat du manque de projets politiques à long terme ou de la poursuite d'intérêts
économiques aveugles, qui se transforment, malheureusement, en une sérieuse menace envers la création... Quand on utilise des ressources naturelles, il faut se préoccuper de leur sauvegarde, en
en prévoyant aussi les coûts en termes environnementaux et sociaux, qui sont à évaluer comme un aspect essentiel des coûts mêmes de l'activité économique. Il revient à la communauté internationale et aux gouvernements de chaque pays de donner de justes indications
pour s'opposer de manière efficace aux modes d'exploitation de l'environnement qui lui sont nuisibles. Pour protéger l'environnement, pour sauvegarder les ressources et le climat, il convient,
d'une part, d'agir dans le respect de normes bien définies, également du point de vue juridique et économique, et, d'autre part, de tenir compte de
la solidarité due à ceux qui habitent les régions plus pauvres de la terre et aux générations futures.
La mise en place d'une solidarité inter-générationnelle loyale semble en effet urgente... L'usage des ressources naturelles devrait être tel que
les avantages immédiats ne comportent pas de conséquences négatives pour les êtres vivants, humains et autres, présents et futurs; que la sauvegarde de la propriété privée ne fasse pas obstacle à
la destination universelle des biens; que l'intervention de l'homme ne compromette pas la fécondité de la terre, pour le bien d'aujourd'hui et celui de demain. Au-delà d'une loyale solidarité
intergénérationnelle, l'urgente nécessité morale d'une solidarité intra-générationnelle renouvelée doit être réaffirmée, spécialement dans les relations entre les pays en voie de développement et
les pays hautement industrialisés... La crise écologique montre l'urgence d'une solidarité qui se déploie dans l'espace et le temps. Il est en effet important de reconnaître, parmi les causes de la crise écologique actuelle, la responsabilité historique des
pays industrialisés. Les pays moins développés, et en particulier les pays émergents, ne sont pas toutefois exonérés de leur propre responsabilité par rapport à la création, parce que tous ont le
devoir d'adopter graduellement des mesures et des politiques environnementales efficaces. Ceci pourrait se réaliser plus facilement s'il y avait des calculs moins intéressés dans l'assistance,
dans la transmission des connaissances et l'utilisation de technologies plus respectueuses de l'environnement.
Il est hors de doute que l'un des points principaux que la communauté internationale doit
affronter, est celui des ressources énergétiques en trouvant des stratégies communes et durables pour satisfaire les besoins en énergie de cette génération et des générations futures. A cette
fin, il est nécessaire que les sociétés technologiquement avancées soient disposées à favoriser des comportements plus sobres, réduisant leurs propres besoins d'énergie et améliorant les
conditions de son utilisation. Simultanément, il convient de promouvoir la recherche et l'application d'énergies dont l'impact environnemental est moindre
et la " redistribution planétaire des ressources énergétiques ... afin que les pays qui n'en ont pas puissent y accéder...
Afin de conduire l'humanité
vers une gestion d'ensemble plus durable de l'environnement et des ressources de la planète, l'homme est appelé à engager son intelligence dans le domaine de la recherche scientifique et
technologique et dans l'application des découvertes qui en découlent. La nouvelle solidarité que Jean-Paul II propose dans le Message pour la Journée mondiale de la paix 1990, et la
solidarité mondiale à laquelle j'ai moi-même fait appel dans le Message pour la Journée mondiale de la paix 2009, sont des attitudes essentielles pour orienter les efforts en vue de la sauvegarde
de la création, par un système de gestion des ressources de la terre mieux coordonné au niveau international, surtout au moment où apparaît, de façon toujours plus évidente, la forte relation qui
existe entre la lutte contre la dégradation environnementale et la promotion du développement humain intégral... Il est nécessaire, enfin, de
sortir de la logique de la seule consommation pour promouvoir des formes de production agricole et industrielle respectueuses de l'ordre de la création et satisfaisantes pour les besoins
essentiels de tous. La question écologique ne doit pas être affrontée seulement en raison des perspectives effrayantes que la dégradation environnementale
dessine à l'horizon. C'est la recherche d'une authentique solidarité à l'échelle mondiale, inspirée par les valeurs de la charité, de la justice et du bien commun, qui doit surtout la
motiver.
Il est de plus en plus clair que le thème de la dégradation
environnementale met en cause les comportements de chacun de nous, les styles de vie et les modèles de consommation et de production actuellement dominants, souvent indéfendables du
point de vue social, environnemental et même économique... Nous sommes tous responsables de la protection et du soin de la création. Cette responsabilité ne connaît pas de frontières. Selon le
principe de subsidiarité, il est important que chacun s'engage à son propre niveau, travaillant afin que soit dépassée la suprématie des intérêts particuliers. Un rôle de sensibilisation et de
formation incombe en particulier aux divers sujets de la société civile et aux organisations non-gouvernementales, qui se dépensent avec détermination et générosité à l'expansion d'une
responsabilité écologique, qui devrait être toujours plus attachée au respect de l'écologie humaine.
L'Eglise a une responsabilité vis-à-vis de la création et elle pense qu'elle doit l'exercer également dans le domaine public, pour défendre la terre, l'eau et l'air, dons du Dieu Créateur à tous,
et, avant tout, pour protéger l'homme du danger de sa propre destruction... Les devoirs vis-à-vis de l'environnement découlent des devoirs vis-��-vis de la personne considérée en elle-même, et en
relation avec les autres. J'encourage donc volontiers l'éducation à une responsabilité écologique, qui, comme je l'ai indiqué dans l'encyclique Caritas in Veritate, préserve une
authentique écologie humaine, et affirme ensuite avec une conviction renouvelée l'inviolabilité de la vie humaine à toutes ses étapes et quelle que soit sa condition, la
dignité de la personne et la mission irremplaçable de la famille, au sein de laquelle on est éduqué à l'amour envers le prochain et au respect de la nature... Par ailleurs, une conception
correcte de la relation de l'homme avec l'environnement ne conduit pas à absolutiser la nature ni à la considérer comme plus importante que la personne elle-même. Si le magistère de l'Eglise
exprime sa perplexité face à une conception de l'environnement qui s'inspire de l'éco-centrisme et du bio-centrisme, il le fait parce que cette conception
élimine la différence ontologique et axiologique qui existe entre la personne humaine et les autres êtres vivants. De cette manière,on en arrive à éliminer l'identité et la vocation
supérieure de l'homme, en favorisant une vision égalitariste de la dignité de tous les êtres vivants. On se prête ainsi à un nouveau panthéisme aux accents néo-païens qui font découler le salut
de l'homme de la seule nature, en son sens purement naturaliste.
Si tu veux construire la paix, protège la création. La recherche de la paix de la part de tous les hommes de
bonne volonté sera sans nul doute facilitée par la reconnaissance commune du rapport indissoluble qui existe entre Dieu, les êtres humains et la création tout entière. Les chrétiens, illuminés
par la Révélation et suivant la Tradition de l'Eglise, offrent leur contribution propre. Ils considèrent le cosmos et ses merveilles à la lumière de l'œuvre créatrice du Père et rédemptrice du
Christ qui, par sa mort et sa résurrection, a tout réconcilié sur la terre et dans les cieux".